LIBERTE D'EXPRESSION
Au cours de l’été,
un stagiaire journaliste mâle, que nous appellerons Norbert,
est allé pour son entreprise audiovisuelle que nous appellerons
FR6, à une conférence organisée par le
maire de Toulouse, Philippe Douste Blazy. Lors de cet échange,
Norbert a posé une question simple mais directe au premier
magistrat toulousain. « Combien y a-t-il de chômeurs
à Toulouse ? » Pas décontenancé,
M. le Maire a répondu : « Vous savez, la décentralisation
est un thème fort du gouvernement, merci de m’en parler…
» Il fallait à Norbert, à la demande
de son rédacteur en chef, des images de Douste parlant
des chômeurs. Courageux, Norbert repose sa question ;
Douste lui refait sa réponse, rendant ainsi un hommage
démocratique à ceux qui ne connaissent pas les
dossiers et à ceux qui, Marchais et Staline en tête
aiment la transparence des propos. A la limite de l’acharnement,
troisième tentative, « M. le Maire, pour FR6,
combien y a-t-il de chômeurs à Toulouse ?
» Le maire s’est barré. Énervé.
L’anecdote, au demeurant révélatrice du mépris
dans lequel tous les hommes politiques tiennent la parole publique,
resterait anodine si le support choisi pour transmettre la réalité
permettait de la travestir : en effet, s’il avait fallu rendre
compte par écrit de cette conférence de presse,
on imagine certains artifices, mais, avec les images, on rentre
au bureau avec Douste parlant décentralisation dans un
sujet de 2 minutes sur le chômage en Haute-Garonne, donc
on est dans la merde.
J’ai eu connaissance de cette histoire en cours ; j’ai demandé
à la prof si on pouvait, au montage, dire « on
a posé cette question à Douste, voilà ce
qu’il a répondu » et on balance la décentralisation.
La prof, jeune et sympa, n’était pas étonnée
outre mesure du comportement du maire. Elle a répondu
avec beaucoup de naturel que « ça arrive que
tes interlocuteurs viennent avec un discours qu’ils te serviront
quoi que tu fasses, c’est à toi de chercher la faille,
mais montrer un sujet avec la question du journaliste et la
réponse du maire qui n’a rien à voir, en journalisme,
ce serait proprement révolutionnaire. » Ami
lecteur, si toi aussi tu te demandais ce qu’est la révolution,
voici au moins une part de réponse : une vérité
bien assénée.