LE
PERE NOEL EST UN BORDURE
Le Père Noël
est mort a Sarajevo, dans le ghetto de Varsovie, à Soweto,
Le Père Noël est mort à Tripoli, à
Bagdad, à Verdun, à Kigali, Le Père Noël
est mort dans le Sud du Rwanda, dans le Nord de l'Irak, en Fuyant
Berlin-est, Le Père Noël est mort à Stalingrad,
à Dresde, à Guernica, au Tibet, à Cronstadt.
Mais ne pleurez pas,
ne vous inquiétez pas, il y a encore chez moi de quoi
vous amuser. Mes usines tournent a plein régime, mes
entrepôts débordent : débloquez les budgets
!
Mes jouets sont plus
gros, mes jouets sont plus chers, mais ils font moins de bruit,
plus de morts, moins de taches. Mes poupées ne parlent
pas, elles mutilent et défigurent. Je ne veux pas savoir
ou mènent mes trains électriques.
J'ai débuté
comme armurier dans mon quartier, semant la zizanie pour faire
tourner la boutique. Elle sont loin les rixes de rue, vivement
la guerre totale . Me voila PDG. : mondial-killer en col-cravate.
Je gagne fort bien ma
vie grâce à tout ceux qui la perdent, car c'est
avec mes bombes que se construisent vos tombes. Je vends des
armes à droite, je vends des armes à gauche, la
main qui prend le fric ignore qui passe l'arme à gauche.
De part et d'autres des
frontières, je vends des faux, de vrais cimeterres. Quand
s'étriperont les derniers cons, je leur vendrais des
cimetières. Vous êtes les enfants des balles qui
n'ont pas tué vos parents. A votre tour de procréer,
le monde a besoin de soldats !
Chantez et dansez pour
fêter la libération, moi je trinque plutôt
a la libéralisation. Sur toutes les lignes de front,
à tous les coups, dans tous les camps, mes pauvres ploucs
je serai toujours le seul gagnant !
Pour rester bon-vivant,
je vends de l'armement. A moi l'éclat des discours, a
vous les éclats de grenade. Embrigadés de tous
les pays : déversez vos globules, qu'on entende mugir
les soldats, que votre sang m'abreuve de billons.
Je ferai pas de mal a
une mouche, je ne suis pas franchement cruel, pourtant vos cauchemars
ne m'empêchent pas de dormir. Loin de mes yeux, loin de
mon cœur, vous périssez, vous pourrissez : chacun de
vos cadavres ajoute à ma prospérité.
- RENE BINAME Octobre
94 -
(tiré de l'album " Noël etc… ")