PEUT- ON CRITIQUER
LA DEMOCRATIE ?
La démocratie
signifie, étymologiquement, le " pouvoir du peuple
"(1) : celle-ci est basée sur l'égale participation
des individus à la vie politique, sur la citoyenneté.
A-ton le droit de juger un tel système politique ? Est-ce
que l'on peut adresser des reproches, trouver des défaillances
? Il serait intéressant de s'interroger sur la légitimité
de la démocratie. En outre, l'idéologie est-elle
réellement appliquée, et dans quelle mesure ? Enfin,
la démocratie est-elle viable ?
Des différents systèmes politiques existants (monarchie,
oligarchie, démocratie), seule la démocratie prend
en compte les intérêts de tous, contrairement aux
intérêts d'un ou de quelques uns. Le système
le plus efficace et le moins répressif est celui qui respecte
les différentes opinions et qui fonctionne sur la base
d'une égale participation de tous. Ainsi, il n'y a pas
besoin d'imposer ou de faire imposer des décisions car
celle-ci viennent de la volonté du peuple. Un système
basé sur la soumission à un état de chose
établi, imposé, sur l'obéissance à
la volonté d'un ou plusieurs chefs est un système
répressif. Il faut, dans une recherche incessante d'égalité,
tenir compte au maximum des aspirations populaires car elles-seules
doivent rythmer la vie citoyenne. En effet, un bon système
politique est un système où tout le monde a la parole.
Il en découle une réduction, voire une suppression
des inégalités. Le pouvoir n'est dangereux que s'il
n'est dans les mains de quelques personnes seulement car ils décident
et contrôlent la vie d'autres individus, d'ailleurs souvent
à leur profit. Tout le monde doit avoir le contrôle
de sa vie, toute injustice doit être éliminée
dans la mesure du possible : dans cette perspective, l'oligarchie
et la monarchie sont mauvais pour la société (autant
pour la cohésion sociale que pour la qualité des
relations interpersonnelles). Il n'y a pas de personne qui sache
mieux qu'un individu donné ce qui est bon pour lui (2).
Le pouvoir de quelques uns sur d'autres est illégitime,
la liberté se transformerait alors en une vaste tromperie,
en un mensonge doublé d'hypocrisie. Celui qui commande
d'autres au nom de quoi que ce soit (religion, valeur quelconque…)
est un dictateur, il dicte aux autres le comportement qu'il souhaite
qu'ils aient. Car vouloir commander se fait au mépris des
autres, c'est nier l'existence, l'esprit, la pluralité
des goûts, la multitude des formes de pensée, les
désirs de chacun : commander par orgueil de " savoir
" ce dont les autres ont envie ou ce qu'ils doivent faire.
Par opposition au pouvoir d'un seul ou de quelques individus,
la démocratie est l'expression la plus juste du pouvoir,
sa légitimité n'est plus à démontrer.
Ainsi, le principe démocratique est le plus approprié
pour quiconque cherche un système où la répression
laisse place à la citoyenneté, où l'injustice
se transforme en équité. Cependant, entre principe
et application, il y a une marge qui se traduit par un constat.
Le " pouvoir
du peuple ", expression sacrée par tout régime
démocratique, semble se trouver devant un paradoxe : alors
que la démocratie représentative offre au peuple
diverses occasions de faire valoir sa citoyenneté, celui-ci
n'en use qu'avec modération (le degré de citoyenneté
étant ramené au pourcentage de participation électorale…).
Comment expliquer une telle absence d'intérêt pour
la vie politique ? (3)L'idéologie démocratique peut-elle
fonctionner face à cette démotivation du peuple
? La démocratie, telle qu'elle est entendue dans les diverses
sociétés actuelles, est une démocratie de
type représentatif basée sur l'élection de
" représentants " populaires, élus sur
la base d'un programme. Cependant, la démocratie prend
alors une tournure différente des principes mêmes
qui la composent. Ces principes, représentés par
l'égale participation des citoyens à la vie politique
et citoyenne sont parfois trahis : la démocratie représentative
prend dans l'intégralité des cas des allures d'oligarchie(1),
les représentants niant les aspirations populaires, base
de leur élection. Dans ces cas de dérive, comment
faire croire qu'une démocratie représentative est
l'expression des principes démocratiques : comment un peuple
peut gouverner alors qu'il n'a aucun contrôle sur son représentant
au pouvoir ? Il est important de rappeler qu'il n'existe pas de
personnes qui sache mieux qu'un individu ce qui est bon pour lui.
Le discours souvent proposé (" je sais bien ce qu'il
veut, ce qui est bon pour lui ") est une hérésie
: chaque être est unique et ne vaut ni plus ni moins qu'une
opinion. Actuellement, il y a une opinion dominante au pouvoir
(et changeante dans le temps) sur la durée d'un même
mandat : les principes démocratiques sont, il faut le dire,
complètement faussés…
La démocratie représentative
DETOURNE les principes démocratiques. Un tel constat laisse
place à une interrogation légitime : la démocratie
est-elle viable ?
Les allures que prennent
les démocraties représentatives sont différentes
du rôle qui leur est assigné. La démocratie
représentative est une illusion dangereuse car il s'agit
d'une oligarchie cachée. En effet, des personnes élues
sur la base d'un programme ou d'une idéologie qu'ils ne
sont absolument pas obligés ou tenus de respecter - qui
plus est, de nombreuses libertés sont prises sans demander
au peuple son avis sur la question - ne constituent en aucun cas
des représentants démocratiques légitimes.
Les décisions prises ne viennent donc pas du peuple, il
" subit " les décisions prises en amont (4) :
le " pouvoir du peuple " est une imposture car peu nombreux
sont les liens entre " gouvernants " et " gouvernés
", " dominants " et " dominés ".
La démocratie représentative veut arriver à
représenter le peuple : cet objectif n'est pas et ne pourra
jamais être rempli réellement car le principe même
fausse d'avance le jeu. Ainsi, à la question " la
démocratie est-elle viable ? ", nous répondrons
qu'elle ne peut et ne pourra jamais remplir le rôle qui
lui a été assigné, base de sa légitimité.
Pourquoi un citoyen devrait-il élire une personne qu'il
ne connaît pas, issus d'un milieu social totalement différent
(que je sache, des prolos à l'Élysée, c'est
assez rare (5) ) et qui ne peut donc absolument pas savoir ce
que ce citoyen désire ou pense ? Quel est le lien entre
le citoyen et la personne élue, sinon un lien de domination
? Un système démocratique basé, par opposition,
sur l'élection de délégués élus
sur la base d'un mandat précis et révocables à
tout moment - afin d'éviter certaines dérives possibles
comme une prise de pouvoir - demeure seul un système démocratique,
porteur de la " voix du peuple ", représentant
le fameux " pouvoir du peuple ". Effectivement, cette
organisation de la société repose sur la ont tous
leur mot à dire : en fait, les décisions prises
en AG permettent de se rendre compte de la diversité des
opinions sur un sujet précis et par là, tenter de
trouver des compromis afin de gérer au mieux la vie intra
et inter communautaire… Les décisions prises démocratiquement
ne sont alors plus " subies de l'amont " mais découlent
du peuple (6). La démocratie directe supprime les risques
de prise de pouvoir ou de décision arbitraire, les "
élus " n'ayant purement et simplement qu'un rôle
exécutif : celui-ci n'est absolument pas autorisé
à prendre de décision, n'étant que l'organe
exécutif du groupe dont il est issu et duquel il a été
car c'est l'ensemble du peuple qui gouverne, c'est une application
du peuple " prend - ou regagne - tout son sens.
Finalement, la démocratie
se révèle être l'outil le plus juste, porteur
d'équité au sein de la société. La
citoyenneté ne peut pleinement s'épanouir que dans
un cadre démocratique. La viabilité de tels principes
n'est plus à démontrer, si son application n'est
pas encore efficiente : l'expression la plus pure de la démocratie
ne peut être atteinte avec un système de représentativité
passive tel qu'il est proposé de nos jours. Les aspirations
du peuple ne sont-elles pas la base de la démocratie, ne
sont-elles pas ce qui rythme la vie ? Leur respect ne demande
qu'à voir le jour.
Cerf
Noir
(1) Du grec " dêmos
" ( peuple) et " cratein " (gouverner) ; monarchie
veut donc dire " pouvoir d'un seul ", oligarchie "
gouvernement d'un petit nombre " et anarchie… " absence
de pouvoir " (pour les incultes !).
(2) " décider à sa place " ne concerne
évidement que le politique et le social, car, comme disait
Bakounine : " En matière de chaussure, je m'en remet
à l'autorité du savetier "
(3) Est qualifiée de " politique " l'action qui
permet à quelqu'un de participer à la vie de la
cité : c'est à dire celui qui, vivant dans une société
donnée, apporte son concours à la somme des actions
et décisions prises au sein de la communauté. Acheter
du pain est un acte politique, donner son avis en est un aussi.
(4) Ci-dessous, deux graphiques qui permettront de mieux faire
comprendre le fonctionnement des deux types de démocraties
dont il est question par la suite.
(5) Même si il y en avait, ça ne changerait pas grand
chose…
(6) Pour mieux comprendre le principe de " démocratie
directe " et de " fédéralisme ",
je vous conseille de lire la brochure de la CNT AIT intitulée
" La récupération politique dans les mouvements
de grève étudiants " (10f pc à notre
adresse, chèque à l'ordre du CDES)
Paru dans le
numero 24 du journal des JL "Il
était une fois la révolution, con!"
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